法语助手
2024-05-13
Attention !
Cette vidéo contient des évocations de violences
à l'encontre des chats à travers l'histoire.
Afin de ne pas les choquer,
veillez donc à éloigner de l'écran vos amis à poils et à moustache
pendant la durée de l'émission.
Merci.
Mes chers camarades, bien le bonjour !
C'est le plus grand complot de l'Histoire.
Ils sont des millions, depuis des milliers d'années,
ils sont là, à nous observer, à nous manipuler,
à squatter nos canapés !
Eux, eh bah c'est les chats,
ces monstres à qui on laisse tout faire,
et qu'en plus on gave de nourriture succulente,
aux frais de la princesse !
Et pourtant, entre les humains et les chats, tout n'a pas toujours été tout rose !
Alors, comment ça a commencé tout ça ?
Lorsque les humains développent l'agriculture,
notamment dans le Croissant Fertile au Moyen-Orient,
le stockage des grains devient un problème essentiel.
Comment les protéger contre les rongeurs ?
C'est là qu'entre en scène le chat sauvage d'Afrique, aussi appelé chat ganté.
Moins farouche que ses cousins européens,
c'est sans doute de lui que descendent nos matous.
Et c'est lui que les premiers paysans ont laissé
peu à peu pénétrer leur espace domestique
pour protéger le fruit de leur récolte contre les souris.
Durant les fouilles d'un village agricole néolithique retrouvé à Chypre,
une équipe du CNRS a ainsi découvert au début des années 2000 divers restes de renards,
de chiens, de chats datant du 8e millénaire avant notre ère,
prouvant bien que les félins étaient déjà utilisés comme compagnons,
mais aussi comme nourriture et comme source de fourrure… comme le chien d'ailleurs.
Mais une tombe de chat retrouvée à côté de celle d'un humain,
suggère qu'il a pu exister des liens forts entre certains de nos ancêtres et des félins domestiques.
Donc on est déjà dans l'apprivoisement, voire la domestication, mais ça se discute.
Les choses deviennent beaucoup plus claires un petit peu plus tard, en Égypte ancienne.
Dans cette autre grande civilisation agricole,
on trouve les premières traces écrites et picturales de chats clairement domestiqués.
Dès la fin du 3e millénaire avant notre ère,
certains Égyptiens ont des noms dérivés du mot "chat",
et leur transcription en hiéroglyphe comprend parfois un chat stylisé.
On retrouve des images des chats domestiques au 15e siècle avant notre ère,
par exemple dans les tombes de la région de Thèbes,
comme celle de Nakht, un scribe et astronome du dieu Amon vivant sans doute
sous le règne de Thoutmôsis IV vers 1390 avant notre ère.
Une scène de banquet montre un chat tranquillement installé
sous la chaise des maîtres de maison,
et il mange même un poisson entier !
Vers la même époque, la tombe de Saqqarah,
près de Memphis, montre une situation identique.
Et la posture de l'animal imite celle des humains,
comme s'il était un membre à part entière du foyer.
Ça c'est vraiment le pompon !
Et ça va encore plus loin, et c'est ça qui est le plus dingue en Égypte :
l'ascension du chat va se poursuivre,
jusqu'à intégrer l'imaginaire religieux !
Mais évidemment, ça ne s'est pas fait en un jour…
Tout d'abord, les habitants de la vallée du Nil considéraient que
leurs divinités pouvaient s'incarner dans des animaux,
comme le taureau par exemple.
Alors pourquoi pas un chat ?
Et ensuite, ils ont remarqué les incroyables talents de chasseur du chat,
capable notamment de tuer les serpents.
C'est pourquoi chats et serpents sont liés dans leur mythologie.
Lorsque vient la nuit, le dieu du soleil Râ bascule sous l'horizon et parcourt les enfers.
Il y affronte Apophis, un redoutable dieu serpent capable
de prendre de nombreuses apparences… et d'avoir une tête de chat !
Du coup, il n'est pas étonnant qu'on retrouve aussi le chat dans le Livre des Morts,
ces papyrus bien pratiques pour protéger l'âme du défunt dans l'au-delà.
C'est ainsi qu'une version du 13e siècle avant notre ère,
pour illustrer l'âme qui résiste aux forces du néant,
peut utiliser l'image d'un chat terrassant un serpent.
Et ce chat protecteur rencontre un tel succès que peu à peu se développe le culte de Bastet,
une divinité qui a carrément l'apparence d'un félin domestique !
Au départ, la déesse Bastet était une simple variante de la fille de Râ, la déesse lionne Sekhmet.
Mais si Sekhmet est une incarnation de la rage et de la guerre,
Bastet se la joue plutôt douceur et paix du foyer.
C'est seulement au 10e siècle avant notre ère,
à partir de la ville de Bubastis,
que Bastet prend son apparence féline et se déploie dans toute l'Égypte.
Il faut dire que les souverains de la 22e dynastie viennent justement de cette ville,
et ont peut-être voulu favoriser son culte !
Résultat, durant tout le 1er millénaire avant notre ère,
Bastet est l'une des divinités les plus populaires,
au point d'ailleurs qu'on finit même par considérer les chats comme des animaux sacrés.
Et ça, Diodore de Sicile en a été le témoin encore au 1er siècle :
pour avoir tué un chat, un marchand romain a été massacré par une foule en colère,
alors même qu'il était sous la protection du pharaon.
Peut-être que l'anecdote est exagérée,
mais elle colle avec le contexte du moment :
la société égyptienne, en déclin, dirigée par des rois étrangers,
refuse de voir ses symboles et dieux locaux traînés dans la boue.
La foule surréagit, afin de réaffirmer son identité.
D'ailleurs ce n'est pas un hasard si les fouilles ont trouvées
de très nombreuses statues de chat datant de cette époque,
comme le bronze de Gayer-Anderson, ou encore une déesse-chat maternelle,
élevant quatre chatons à ses pieds.
Elle porte aussi un sistre, un instrument de musique,
car on l'associe à la fécondité, à l'accouplement,
mais aussi à la fête et à l'ivresse.
Le Grec Hérodote affirme que ses célébrations sont l'occasion de beuveries,
de spectacles, et de danses à forte connotation sexuelle.
Au bout du compte, et c'est logique,
l'Égypte des derniers siècles finit par traiter les chats comme des individus à part entière.
Lors de rites funéraires, ils sont mis dans des tombes,
parfois momifiés dans leurs propres cimetières réservés.
Et on ne parle pas d'un phénomène anecdotique.
Lors de certains pillages occidentaux du 19e siècle,
un seul chargement vers l'Angleterre compte plus de 180 000 chats momifiés !
Le pire, c'est qu'on les détruit pour en faire de l'engrais.
Heureusement, celles qui ont été conservées nous en apprennent beaucoup :
les momies de chats imitent celles des humains,
certaines comportent des pieds, et le corps des bêtes est souvent placé à la verticale.
D'autres ont des masques funéraires en bronze,
et certains sont si détaillés qu'on retrouve même des moustaches gravées dans le métal !
Mais attention : c'est pas parce qu'ils vénèrent les chats qu'ils les respectent plus que nous,
qui les accueillons, les nourrissons etc. En fait c'est un peu plus compliqué que ça !
L'offrande de momies étant un moyen pour attirer les bonnes faveurs divines,
les temples n'hésitent pas à élever,
à tuer, et à momifier des chats, afin de répondre à la demande des fidèles.
Et ça permet de financer les cultes :
c'est ainsi que les momies de chats embaumées sont souvent celles de félins étranglés,
ou au crâne fracturé, à un très jeune âge.
Cette catmania égyptienne est d'ailleurs moquée par le monde gréco-romain,
plutôt fan des petits oiseaux domestiques,
que le chat menace justement.
Bien qu'implanté de ce côté de la Méditerranée dès l'Antiquité,
le chat est donc vu comme un animal suspect,
voire négatif.
Aristote critique leurs femelles à la sexualité "très ardente",
et la vision péjorative du chat va se poursuivre,
aussi bien sous le paganisme que le christianisme du Moyen Âge.
Mais on n'en est pas encore à le haïr,
au contraire : ce chasseur de souris est utile à la maisonnée,
et des lois condamnent les tueurs de chats à une amende.
Des relations de tendresse existent entre eux et les humains,
et on sait que certains chats reçoivent un nom,
comme aujourd'hui.
Mais attention, encore une fois, c'est toujours pas la même relation !
Le chat reste un animal comme les autres,
il peut être tué pour sa peau, qui se vend bon marché et qui est taxée.
Dans le port d'Ipswich, en 1303,
il faut par exemple payer quatre deniers de droits pour mille peaux de chat domestique.
On en fera toutes sortes de choses, notamment des gants.
C'est comme ça que le vieux français "mitou" a donné les mots "matou", mais aussi "mitaine".
Si on ne mange de la viande de chat qu'en cas de siège ou de famine,
les progrès culinaires changent un peu la donne.
À la Renaissance, Robert de Nola, cuisinier du roi de Naples,
propose dans son ouvrage de 1520 une recette de chat rôti à l'huile et à l'ail.
Bon appétit !
Alors, oui je sais, c'est un petit peu dur à imaginer de nos jours… Mais à chaque époque,
ses propres coutumes.
Et comme on l'a dit, depuis la Rome antique,
le chat a une image assez ambigüe…
C'est d'abord, d'un point de vue religieux,
une bête suspecte qui n'apparaît pas dans la Bible.
Les auteurs chrétiens voient dans le chat un attachement vaniteux aux biens terrestres,
comme Ermold le noir qui au 9e siècle raconte l'histoire d'un ermite
si pieux que Dieu lui apparaît chaque jour.
Mais lorsqu'un chat rentre chez lui,
il s'y attache trop, ce qui le prive de ses visions :
trop proche du petit félin, il a oublié ses devoirs envers le Seigneur.
L'ermite, dévasté, chasse alors violemment l'animal de chez lui.
Ce genre de légendes a de nombreuses variantes,
qui se diffusent tout au long du Moyen Âge.
Les ecclésiastiques associent peu à peu le chat aux péchés capitaux :
la paresse, la gourmandise, la luxure,
et l'orgueil.
Au 15e siècle, lorsque Cosimo Rosselli peint le dernier repas de Jésus,
Judas nous tourne le dos, tout près d'un chat et d'un chien qui s'affrontent :
c'est le combat de la fidélité à Dieu contre sa trahison.
Mais dès le 12e siècle, on voyait dans le chat la trahison des préceptes de l'Église,
et donc, l'hérésie.
On accusait par exemple les cathares de vénérer le Diable,
qui prenait alors la forme d'un chat noir ou d'un chat roux.
Encore au 16e, le catholique Thomas Murner se moque des protestants,
qui ont des traits de chats et séduisent les femmes.
C'est là qu'il faut trouver l'origine du "chat noir qui porte malheur",
et autres superstitions qu'on retrouve de nos jours.
Mais ce n'est pas le cas dans le monde musulman,
où le chat est vu d'une toute autre façon.
Si une tradition tardive raconte que le Prophète Muhammad avait un chat appelé Muezza,
le plus convaincant ce sont ses hadiths,
ses actes et paroles du 9e siècle.
Très clairement, le Prophète y affirme que ceux qui maltraitent les chats sont condamnés à aller en enfer.
Peu après, l'érudit Al-Jahiz qui compose le Livre des Animaux est encore plus clair :
si le chien est une bête malpropre à éviter,
il faut au contraire aimer son opposé,
le chat, qu'on peut laisser dormir dans son lit,
et même embrasser sur la bouche, car ils auraient très bonne haleine.
Forcément, cette façon de voir les choses étonne les voyageurs occidentaux du 16e siècle,
comme Josse de Ghistelles.
Ce Flamand raconte comment à Damas,
la population entretient un refuge pour chats.
Au 19e siècle, l'anglais Edward William Lane découvre
que les autorités du Caire nourrissent et entretiennent à leurs frais un jardin réservé aux chats.
Selon lui, cette institution aurait été fondée dès le 13e siècle,
par le sultan mamelouk Baybars !
Mais il y a un point sur lequel les érudits chrétiens et musulmans sont entièrement d'accord :
les chats sont associés aux femmes.
Chez Al-Jahiz, la femme et le chat se partagent l'intérieur du foyer,
l'homme étant prié de concentrer ses activités à l'extérieur.
Nombre de peintures reflètent cette idée :
au 16e siècle, Pinturicchio montre le retour d'Ulysse à Ithaque :
son épouse Pénélope, restée à la maison pendant des années,
est entourée de son célèbre métier à tisser et d'un chat.
À ses pieds, l'animal joue avec une pelote de laine.
Pendant tout ce temps, la vie domestique s'est poursuivie,
loin des mésaventures du mari.
L'association entre féminité et félinité est d'ailleurs parfois plus négative :
on y associe une sexualité excessive,
que les auteurs religieux mais aussi laïcs condamnent.
C'est un danger : les hommes perdraient la tête,
à trop fréquenter des femmes tentatrices !
À partir du 17e siècle, on associe le sexe féminin à la femelle du chat,
ce qui existe toujours dans l'argot.
Mais à l'époque, c'était une question grave :
chat, hérétique, femme, aboutissent à la figure de la sorcière,
cette créature capable de prendre une forme féline.
Au départ, les Inquisiteurs rigolent de ce genre de croyance, qui est entièrement populaire.
Mais l'idée fait son chemin, souvent réutilisée
dans les grandes chasses aux sorcières modernes des 16e et 17e siècles.
C'est ainsi que les trois jeteuses de sort de Macbeth sont accompagnées d'un hérisson et d'un chat :
Shakespeare a juste reprit une idée qui était très courante à l'époque !
Petite précision pour ceux qui pensent au chat porte-bonheur japonais,
le Maneki Neko : entre la longévité du chat chinois,
la sagesse et l'individualisme du chat coréen,
ou la façon dont le chat japonais s'est répandu dans toute la culture des mangaka,
il nous faudrait un tout autre épisode !
Ce sera donc à une autre occasion,
lorsqu'on reparlera des croyances et des coutumes d'Extrême-Orient !
Mais pour l'instant, on va rester sur notre maudit chat noir d'Europe… Bon aller,
assez parlé de malheur !
Même en Occident, le chat ne se réduit pas à un bifteck ou à un petit sorcier poilu.
Il a aussi un côté presque positif !
Dans les textes profanes, il est l'animal des pauvres.
C'est le cas du vieux conte du chat botté,
que Charles Perrault a peut-être copié au 17e siècle d'une version du 16e siècle,
celle du vénitien Straparola.
Dans cette histoire, le troisième fils d'un meunier,
orphelin, laissé sans le sou, est aidé par un chat.
Très rusé, son petit ami l'aide à devenir marquis, et même prince du royaume !
Compagnon des démunis, le chat accompagne aussi les marginaux,
surtout les fous et les bouffons qui se moquent des puissants.
C'est le cas dans un livre d'heures du 16e siècle,
où le fou et son chat sont bien placés de côté,
en marge du texte religieux, car telle est leur place dans l'ordre divin.
C'est aussi le cas dans le jeu de Tarot :
l'Excuse, qu'on appelait autrefois le Fol, ou le Mat,
est un bouffon mordu par un chat sur certaines vieilles cartes françaises du 17e siècle.
Mais ce côté drôle, un petit peu bouffon, un peu moqueur,
il améliore pas radicalement la condition des chats.
Si on les associe à la fête, c'est dans célébrations…
plutôt sanglantes, et souvent à leurs dépens.
Alors, je vous préviens, âmes sensibles, s'abstenir !
Lors de la saint Jean, on jette des chats dans les grands feux allumés à cette occasion,
comme par exemple à Metz dès 1344.
C'est d'autant plus compliqué à comprendre qu'à nos yeux, c'est absolument horrible.
Alors, est-ce c'est parce que les félins avaient une mauvaise image ?
Sans doute.
De nombreuses sources font mention d'actes de cruauté envers eux,
comme en 1547 où, en l'honneur de Charles Quint,
on mit en place un orgue à chat, appareil dans lequel
des bêtes enfermées produisaient des sons lorsque l'on tirait sur la queue.
On a aussi retrouvé des chats emmurés dans des maisons, parfois à côté d'un rat.
Et ça, ça permet une autre hypothèse,
beaucoup plus surprenante :
associés à la protection des récoltes et des foyers contre les rongeurs,
les chats seraient tués rituellement lors d'événements importants,
liés au calendrier agricole comme la saint Jean.
Idem au moment de construire un logis,
où ils servent de porte-bonheur,
garantissant que la maisonnée ou la communauté sont protégées des rats,
donc de la faim.
Enfin, comme un chat coûte quand-même moins cher
que d'autres animaux domestiques du type vache ou chèvre,
eh bien ça facilite le rituel.
Au final, on retombe un peu sur nos fameux temples égyptiens,
qui de façon quasi industrielle, mettaient à mort des chats,
chargés de protéger les défunts !
Mais tout ça va heureusement changer dans certains pans de la société.
Au 18e siècle, les cercles les plus privilégiés ont une nouvelle attitude :
l'importation de races orientales, les fameux "persans",
a joué un rôle.
Les chats deviennent des compagnons de luxe,
qui permettent de se distinguer, et symbolisent alors quelque chose de nouveau.
En 1727, Montcrif leur dédie un ouvrage où il défend leurs vertus :
pour lui, le chat est un idéal d'indépendance et de révolte,
tout ce qui distingue la philosophie des Lumières d'un temps
"moyenâgeux" entre guillemets,
censé être obscur.
Le chat est alors l'hôte de marque des salons intellectuels et artistiques,
jusqu'au 19e siècle où il est adopté par les romantiques.
Ce courant littéraire et artistique lui donne un autre sens :
il voit dans le chat le romantisme des sorcières du Moyen Âge,
mais aussi un trophée égyptien, reflet des mystères de l'Orient.
Celui qui possède un chat, et ose côtoyer son comportement étrange et dangereux,
celui-là est un marginal, un vrai de vrai !
Victor Hugo, Théophile Gautier, ou encore Baudelaire,
qui lui consacre trois poèmes dans 'Les Fleurs du Mal',
adorent tous le chat.
Les peintres orientalistes comme Edwin Long l'utilisent dans leurs compositions :
souvent associé aux femmes dénudées,
c'est un animal de rêve, langoureux,
lascif, qui parcourt librement les harems,
comme une Bastet sans-gêne.
Et c'est vrai qu'il a tendance à se fourrer partout,
surtout au centre de l'attention,
ceux qui bossent sur un bureau à la maison le savent très,
très bien !
En tout cas, le chat continue d'être le meilleur ami du marginal,
de l'artiste et de l'intellectuel.
Au 20e siècle, c'est le copain des artistes bohèmes,
l'emblème du cabaret de Montmartre Le Chat noir,
fondé en 1881, et fréquenté par Verlaine.
Le temps de filer sur une gouttière,
et hop, le voilà chez Cocteau et Colette.
Puis il traverse l'Atlantique : aux États-Unis,
où on aime bien associer les partis politiques aux animaux,
il a un nouveau destin.
Il y a donc l'éléphant des Républicains,
l'âne des démocrates, et le chat de l'IWW,
l'Industrial Workers of the World, un syndicat fondé en 1905
par des militants socialistes et anarchistes.
L'organisation, qui n'hésite pas à menacer les patrons d'usine de sabotage
si leurs conditions de vie ne sont pas améliorées,
utilise dès 1913 le chat noir comme emblème.
Si le spéculateur abuse de son pouvoir,
alors il lui arrivera malheur, comme l'annonce les dessins dans leur journal !
Le chat finit par symboliser le sabotage :
tel un sphinx gigantesque,
il peut écraser sous son poids le patron abusif,
qui se retrouve bien seul, et bien ridicule !
On peut dire quand même que c'est un sacré tournant pour notre chat antique,
protecteur du grain, de l'ordre, chasseur de rats outsiders :
là, au contraire, il s'est transformé en devenant le pote des libertaires et des anarchistes !
C'est le cas par exemple de George Brassens,
célèbre ami des chats dont il parle régulièrement dans ses chansons.
En 1968, le caricaturiste Siné, dans son livre "Je ne pense qu'à chat",
est sans doute le premier à dire : "Si je préfère les chats aux chiens,
c'est qu'il n'y a pas de chat policier".
Une phrase qu'on associera ensuite souvent à Jacques Prévert,
et de nos jours le chien continue d'incarner l'ordre et la fidélité,
et le chat, pour citer l'historien Éric Baratay,
plutôt tous ceux "qui rêvent d'indépendance vis-à-vis des pouvoirs économique et politique."
Dans la culture populaire,
il peut aussi être associé aux génies du mal incontrôlables,
comme Ernst Blofeld, l'ennemi juré de James Bond,
toujours accompagné de son Persan.
Idem dans les dessins animés Tom & Jerry ou Titi & Grominet,
où le chat est un goinfre imbécile qui s'en prend au plus faible,
heureusement malin et courageux.
Sans oublier Catwoman, une super-vilaine à la base,
qui en 1940 est encore associée à une femme fatale,
séductrice incontrôlable, voleuse, et capricieuse.
Mais tout change avec le temps : Tom,
Grominet, Catwoman évoluent, parce que les mentalités changent !
Dans une société hyperconnectée et hyperactive, il est un rappel à la nature idéale.
Pensez à Garfield, magnifique glandeur des années 1970,
bâfreur de lasagne avachi, qui profite de la vie sans rien faire.
Pas comme son humain, Jon, ce salarié à cravate,
esclave de sa boîte, sans arrêt sous caféine…
Et on retrouve cette idée dans les années 1980 avec le dessin-animé Les Entrechats :
quand les humains ne sont pas là, les chats dansent !
Et je sais pas si vous connaissez la meilleure,
mais à force de nous côtoyer, les chats aussi ont changé !
Eh ouais, parce que apparemment le ronronnement,
à la base, c'était un comportement de chaton uniquement.
Mais comme on les a fait passer de l'animal utile,
qui chasse des souris, à l'animal ami,
celui avec qui on joue et on fait des câlins,
eh bah désormais les chats ronronnent,
toute leur vie !
D'ailleurs, ils sont devenus bien plus collants et bavards qu'avant,
quasi accros, au point que certains parlent de "chachiens" !
En tout cas, on va espérer que ça va dans les deux sens,
et qu'ils nous changent aussi en bien !
Alors si vous voulez des lasagnes à chaque repas,
dites-le en commentaire, envoyez un message ou un like.
N'hésitez pas, on fera remonter à William Blanc,
que je remercie pour cet autre superbe épisode,
décidément il n'a pas fini de contribuer à la chaîne,
et on vous prépare d'autres épisodes d'ailleurs sur les animaux !
On se retrouve très bientôt sur Nota Bene, salut !
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