法语助手
2025-06-13
C'est à Paris que je suis devenue noire!
Je venais de débarquer de Martinique pour mes études.
Mais enfin, mademoiselle, on ne fait pas un diplôme d'études là-dessus!
Ça, c'est ce que mon professeur m'a dit
quand j'ai proposé de faire mon mémoire sur "La Case de l'oncle Tom".
J'adore ce livre.
C'est l'un des tout premiers romans anti-esclavagistes.
J'ai tenu bon.
C'était ma première victoire.
Bon...
On m'a quand même imposé d'ajouter un chapitre sur les Blancs.
C'était ça le Paris des années 1920.
Un Paris où la hiérarchie des races était la norme.
Un Paris où l'aplomb et l'intelligence d'une jeune femme noire étonnaient.
Un Paris où une jeune femme noire qui a du caractère et du talent, ça surprenait.
Pour me changer les idées,
j'allais danser dans des petits bals de quartier.
Vers 1920, à Paris, on commençait parfois à entendre ces sons venus d'ailleurs,
des rythmes antillais, des chansons d'anciens esclaves d'Amérique.
Cette musique, ça a été un déclic.
Elle était une fenêtre vers mes origines.
Des origines dont, peut-être pour la première fois,
j'étais fière.
Plus tard, j'ai emménagé avec ma sœur Jane,
à Clamart, près de Paris.
Le dimanche, on recevait!
Des poètes, des politiciens, Senghor était de la partie,
Aimé Césaire aussi.
J'étais portée par un grand mouvement de cœur et de fraternité.
J'avais retrouvé mes frères jusque-là ignorés.
Je me suis donnée à leur cause dans le plus grand enthousiasme.
De nos discussions est né un petit journal:
La Revue du Monde Noir.
Nous voulons créer entre les Noirs du monde entier,
un lien intellectuel et moral qui leur permette de se connaître,
de s'aimer fraternellement et de défendre leurs intérêts collectifs.
On y publiait des poèmes, des fictions.
On y parlait d'art, de littérature.
Mais le rêve était trop beau,
trop grand.
Nos idées dérangeaient.
Le quatrième numéro de la revue n'a jamais été livré en Afrique ni aux Antilles.
Bizarre.
On m'a dit que les exemplaires ont été jetés du bateau.
Quand je suis repartie en Martinique,
je me suis battue contre le fascisme.
J'ai mobilisé les femmes autour du droit de vote.
Et pourtant...
Loin de la métropole,
je suis tombée dans l'oubli.
Et puis ma maison a pris feu avec mes livres,
mes lettres, mes souvenirs.
Mes camarades masculins, eux, ont fait carrière.
Léopold Sédar Senghor a été élu député.
Aimé Césaire est devenu l'icône de notre mouvement, la Négritude.
En réalité, ils ont repris les idées que nous avons brandies, mes sœurs et moi.
Ils les ont exprimées avec beaucoup plus d'étincelles et de brio.
Nous n'étions que des femmes, certes...
Mais de véritables pionnières.
Nous leur avons indiscutablement ouvert la voie!
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