法语助手
2024-10-28
Eh, vous savez pourquoi les Basques peuvent plus rien dire ?
La réponse au bout de cette vidéo, soutenue par notre partenaire MUBI.
Mais d'abord,
on va vous parler de "Victoria", le deuxième film de Justine Triet,
et se questionner sur la place des femmes dans les comédies françaises.
[♫ Musique générique ♫]
Nous sommes en 2016.
André-Pierre Gignac trouve le poteau,
les Britanniques votent le Brexit,
le sixième épisode d'Ace Attorney sort sur 3DS,
et Patrick gagne la Nouvelle Star,
présentée par…
Laurie Cholewa.
"Victoria", c'est l'histoire de Victoria,
une jeune Espagnole qui fait la teuf en plan-séquence à Berlin
jusqu'à ce que la soirée dérape et que…
Mais attendez, c'est pas le bon film là...
Hum hum.
Je reprends.
"Victoria", c'est en fait l'histoire de Victoria,
une quadragénaire parisienne
jouée par Virginie Efira
qui fait la teuf en plan large à un mariage
jusqu'à ce que la soirée dérape et qu'une invitée soit agressée à l'arme blanche.
Si si, là c'est bien ça.
L'accusé est le compagnon de la victime et un ami de Victoria
qui, ça tombe bien, exerce le métier d'avocate…
– Je te jure, je suis prêt à tout pour que tu me défendes.
... À l'évidence, "Victoria" n'est donc pas une comédie française comme les autres.
On pourrait même la classer dans un tout autre genre cinématographique :
le FILM DE PROCÈS.
Vieux comme les condamnations au bûcher,
le genre a très vite donné lieu à quelques chefs-d'œuvre indépassables,
et ce aux quatre coins du monde...
– Nein ! Nein !
Mais c'est seulement à partir des années 60 que le genre se codifie réellement,
avec des films phares tels que
"Du silence et des ombres" ou "Autopsie d'un meurtre",
tirant au mieux parti d'un décor et d'un cérémonial
éminemment cinématographiques.
Même si à l'époque le cinéma français n'est pas en reste,
ce sont surtout les films de procès américains
qui vont s'imposer dans l'imaginaire collectif.
Alors, on jure sur la Bible et on dit...
devant un jury médusé par la démonstration d'avocats
tantôt brillants,
tantôt désabusés,
passant toutes leurs nuits à potasser des jurisprudences
dans des bureaux pas très bien rangés.
En tout cas, un tribunal, c'est sérieux,
et les films de procès relatent généralement des faits dramatiques.
Ce genre est donc a priori peu propice à la comédie.
Oui, si on cherche bien, il existe quand même un certain nombre
de comédies de procès, et certaines sont même assez cultes.
S'il est rare qu'une comédie entière se déroule dans un tribunal,
il arrive souvent qu'on y passe au moins le temps d'une scène.
C'est également le cas dans les comédies françaises,
qui font la part belle aux témoins foutraques…
– Non, plus fort...
... ainsi qu'aux avocats croquignolesques...
– Très bien, nous [bégaiements]
Même si Victoria est tenue à l'écart des prétoires
pendant une bonne partie du film,
c'est bien au tribunal que finissent par se régler
les enjeux de l'histoire,
dans une succession de séquences absurdes...
– Quand on présente au chien, qui se prénomme Jacques,
une chemise lambda, qui n'appartient à personne en particulier,
il bat la queue vers la droite.
Après avoir recueilli le témoignage d'un chien,
on appelle à la barre un dresseur de singes,
avant que Victoria, l'avocate donc,
ne fasse sa plaidoirie finale en totale gueule de bois.
"Victoria" est donc bien une comédie française de procès,
ce qui est rare.
Mais, chose encore plus rare,
c'est une comédie française dont le personnage principal est une FEMME.
Bah oui, parce qu'il faut se rendre à l'évidence,
quand on explore l'histoire de la comédie
comme on le fait depuis maintenant quelques épisodes,
les hommes sont partout.
– On dirait mon grand-père.
Des mecs, des gonzes, des tontons,
des loustics, des frangins, des pignoufs…
À croire qu'il est impossible de faire marrer les Français
sans être doté d'une gigantesque paire de…
Pardon.
D'accord, il existe pour confirmer la règle quelques exceptions notables.
Mais la plupart du temps, ces comédiennes partagent l'affiche avec des hommes.
– Elles se feraient chier d'me répondre, ces deux espèces de pétasses !
Les films qui, comme "Victoria",
sont menés par un personnage féminin réellement central,
sont si rares qu'il existe pour les désigner
une expression toute faite,
employée unanimement de Libération à Vosges Matin...
"Portrait de femme".
Le reste du temps, au cinéma,
les femmes n'existent souvent qu'en fonction des personnages masculins.
Elles sont leur faire-valoirs, leurs épouses, leurs mères ou leurs filles.
– Il est quand même très bien ce garçon,
c'est dommage que tu l'épouses pas !
– Oui mais moi je préfère l'autre.
– [Grognement, cris] La ferme !
« Moi, depuis ma jeunesse jusqu'à mes 30 ans, on va dire,
j'ai vu majoritairement des films
où les personnages principaux étaient des hommes.
Moi, je me suis identifiée aux hommes.
Je ne me suis jamais identifiée à la nana d'à côté.
Je n'ai pas été habituée du tout, ou très peu,
à voir des femmes fascinantes. »
Ce défaut d'identification s'explique simplement.
La plupart des personnages féminins sont écrits par des hommes,
bien démunis quand il s'agit d'imaginer leurs pensées.
Celles-ci sont alors fatalement reléguées au second plan,
voire, comme dans le pilote de la plus culte des sitcoms américaines,
simplement oubliées.
Quand elles ne sont pas ainsi jetées à la corbeille,
les femmes ont, dans les comédies,
tendance à être caractérisées de manière très sommaire...
– Elle a pris quelques centimètres... et quelques kilos aussi !
Plutôt bien répartis.
D'après l'essayiste Judith Stora Sandor,
elles se divisent en deux catégories : la mégère et la séductrice.
La MÉGÈRE, c'est par exemple
l'épouse qui fait la gueule, la belle-mère acariâtre ou la patronne castratrice.
En résumé, c'est le prolongement de l'image maternelle,
la femme qui plonge l'homme dans un état de régression infantile...
– Ça y est c'est Madame !
– On est en retard... Qu'est-ce que Monsieur va prendre !
À l'inverse, la SÉDUCTRICE est celle
qui permet à l'homme de s'épanouir et de trouver son plaisir.
C'est la belle plante vénéneuse qui distrait le héros,
la figure de la maîtresse,
qui a fait les grandes heures du théâtre de boulevard...
– C'est elle !
... ou encore la blonde écervelée,
popularisée par Marilyn Monroe, puis, en France, par Brigitte Bardot...
– Mademoiselle, vous êtes un obélisque de stupidité.
À partir des années 50,
la pulpeuse BB a ainsi multiplié les succès
en incarnant, un peu malgré elle, cet archétype ambigu,
à mi-chemin entre la femme-enfant...
– Oh zut j'ai dit crotte !
... et la bombe sexuelle...
– Vous a-t-on déjà dit que vous étiez adorable ?
– Mais oui monsieur, ce n'était pas la peine de vous déranger.
Virginie Efira aurait tous les atouts pour figurer dans cette lignée,
mais l'objet de "Victoria" n'est
ni de perpétuer l'archétype de la blonde idiote,
ni même d'en prendre le contre-pied...
– Je préfère qu'on ne parle que d'amour, d'argent…
– Moi je dis tout, et pas forcément ce que tu viens chercher.
Puisque d'autres sont déjà passées par là,
Justine Triet capitalise sur les efforts de ses aînées
pour aller, on va le voir, un peu plus loin.
– Je vois pas trop à quoi ça fait référence mais, c'est que...
C'est qu'on ne sait pas toujours dans l'amitié le...
Pardon, c'est pourri. – Faites ça plus simplement.
Et en effet, dès les années 60,
la libération des mœurs et l'émancipation des femmes
ont vite fait tomber en désuétude
les sacrées gamines, les mariées trop belles et les ravissantes idiotes...
– Et maintenant, va te coucher.
– Pourquoi ?
Au cinéma, l'heure est alors moins à la franche rigolade
qu'aux personnages complexes et nuancés...
– Hi... ro... shi... ma…
Jeanne Moreau, Anna Karina,
Delphine Seyrig ou même Brigitte Bardot,
c'est toute une génération d'actrices
qui s'empare de rôles à rebours des stéréotypes...
– Allez fiche le camp ! Fiche le camp ! Tu me dégoûtes...
Avec la Nouvelle Vague, les femmes semblent prendre le pouvoir,
au grand dam de Michel Audiard, illustre représentant du cinéma à l'ancienne...
– Ce que je reproche surtout au jeune cinéma moi,
c'est de manquer précisément de héros.
9 fois sur 10 c'est la femme maintenant qui mène le jeu.
Ne nous emballons pas car, en y regardant de plus près,
le constat de papy Michel semble un peu exagéré.
Si les cinéastes de la Nouvelle Vague se plaisent à filmer de belles jeunes femmes,
c'est avant tout pour exprimer leur imaginaire masculin...
– Les jambes de femmes sont des compas,
qui arpentent le globe terrestre en tous sens,
lui donnant son équilibre et son harmonie.
– Vous dites vraiment n'importe quoi, taisez-vous !
La réalisatrice Agnès Varda,
qui fut pionnière du mouvement en débutant sa carrière dès 1955,
est un peu l'arbre qui cache la forêt.
Sur les quelques 150 cinéastes qui signent leur premier film entre 57 et 62,
le nombre de femmes est tout simplement de... zéro.
Ce grand souffle de renouveau
reste donc très largement burnocentré...
– Tu es ma petite sœur, tu es ma fille, tu es ma mère...
– J'aurais bien voulu aussi être ta femme.
Malgré tout, une porte s'est ouverte,
et les années 70 vont être l'occasion de remettre en question
les vieux schémas de représentation...
– Pourquoi les femmes n'auraient-elles pas le droit de dire
qu'elles ont envie de b**s*r avec un type ?
En comédie, l'essor des cafés théâtres,
portés par une philosophie do-it-yourself
qu'on évoquait dans notre vidéo sur Les Bronzés,
incite plusieurs actrices à s'écrire leur propre rôle,
puis passer à la réalisation.
En parallèle,
dans le sillage de Gérard Oury et de sa fille Danièle Thompson,
les scénarios commencent à s'écrire en doublette mixte...
– Bonjour madame.
– Bonjour madame.
Les récits comiques gagnent alors en variété,
et en subtilité dans le traitement des personnages féminins.
Les mégères et les séductrices sont bientôt rejointes par
les adolescentes amoureuses, les trentenaires désabusées
ou les femmes insoumises,
théorisées par la critique Kathleen Rowe.
Ces dernières bousculent les hiérarchies sociales
en assumant leur physique hors norme et leur caractère outrancier...
– Oh la la, j'ai sué comme une vache... J'suis crade hein !
En 30 ans, le nombre de femmes réalisatrices est multiplié par quinze,
et les comédies de Josiane Balasko,
Tonie Marshall ou Agnès Jaoui
font leur apparition au palmarès des César.
Au box-office, néanmoins, c'est un peu moins la fête.
Parmi les 100 comédies françaises ayant fait le plus d'entrées depuis 1945,
une seule a été réalisée par une femme.
Et comme un symbole, elle raconte l'histoire... de trois hommes.
(Et d'un couffin !)
Ce n'est donc pas faute d'essayer,
mais il semblerait bien que le rejet des archétypes féminins classiques
soit incompatible avec le succès POPULAIRE.
Et c'est vrai que populaire,
"Victoria" ne l'est pas vraiment...
– Donc t'hésites pas à sortir des mots comme...
visiblement, ostensiblement, c'est bien ça.
– Manifestement, incontestablement...
– Oui, assurément...
Sans même parler du box-office,
dominé cette année-là par "Les Tuche", "Camping" ou "Les Visiteurs",
le film de Justine Triet semble par nature s'adresser à un certain public...
– Tu trouves pas que ça marche bien chimiquement entre nous ?
– Je comprends pas ce que tu dis en fait.
C'est en tout cas ce que suggère les références revendiquées par la réalisatrice,
beaucoup moins portée sur Fabien Onteniente ou Jean-Marie Poiré
que sur une certaine comédie américaine chic et surannée.
Dans les années 30,
avec l'arrivée du parlant,
Hollywood a progressivement délaissé le burlesque
au profit d'un humour plus indirect,
fondé sur les dialogues et les personnages.
S'installent alors deux grands courants.
D'une part, la SCREWBALL COMEDY,
portée par un comique de situation et des réparties cinglantes.
Et d'autre part, la comédie sophistiquée,
privilégiant la satire sociale et les oppositions de caractère
plutôt que les gags à effet immédiat.
Sans épouser précisément l'un de ces sous-genres,
Justine Triet en prolonge l'héritage par une mise en scène élégante,
veillant à installer ses effets comiques sans trop les souligner.
Cette sophistication se retrouve dans la caractérisation des personnages.
Au lieu d'ignorer les stéréotypes, Justine Triet les assume,
pour mieux les retourner et en tirer des situations comiques...
– Je peux plus vivre dans cette porcherie.
– Tu sais que t'es mignon quand t'es arrogant, toi ?
– T'es tout le temps absente !
Lâchée par un premier baby-sitter,
Victoria décide d'engager un ancien client, ex-dealer de surcroît,
pour s'occuper de ses filles...
– Et ensuite si tu veux,
je peux aussi devenir ton assistant.
Dès lors, et c'est l'un des principaux ressorts comiques du film,
les rapports de genre sont régulièrement inversés.
On s'amuse alors de voir nos préconceptions prises à contre-pied...
[Gémissements] – Je vous dérange pas ?
– Hein ?
– Je suis pas sûr de kiffer les trips à trois.
– Ah non non c'est pas ce que tu crois,
en fait moi je garde les enfants, je vis dans le salon...
– Ah y a des enfants ?
Bon, bah, c'était très sympa, j'y vais.
– Bah non, mais reste, pourquoi ? – Au revoir.
Si Victoria aime porter des robes à la Mireille Darc,
qui semblent la rattacher à la catégorie des femmes fatales,
son attitude dans l'intimité évoque davantage
un Jean-Pierre Marielle en peignoir...
– J'ai plus mon damier comme d'habitude,
faudrait peut-être que je repasse au dégraisseur, non ?
À chaque fois qu'on pense l'avoir cernée,
Victoria s'avère un peu plus inclassable...
– Qu'un mec soit misogyne, je veux bien, mais alors, toi...
– Non non non non, ça n'a rien à voir.
Non, ce qui est misogyne c'est de penser
que les femmes sont des victimes par nature.
Je suis pas misogyne, je suis désolée.
Pas vraiment séductrice…
– Ah non, c'est pas exactement ce que je pensais faire...
... ni totalement mégère…
– Tu trouves que j'ai une sexualité virile ?
... elle ne se contente pas d'échapper aux avatars féminins,
elle s'empare en prime de traits de caractère
habituellement réservés aux hommes...
– Tu sais, si j'avais dû me limiter aux rôles
qu'on m'offrait théoriquement,
j'aurais pris aucun plaisir dans l'existence hein…
Au vu de la complexité des personnages,
de la relative lenteur du récit, et de la gravité de certains thèmes abordés,
on peut même en venir à se demander si "Victoria" est vraiment une comédie...
– En fait j'ai peur de toi.
T'as le sens du drame anormalement développé.
Dans sa lumière et ses décors soignés,
le film ne cesse d'ailleurs de flirter avec le tragique.
Après tout, il est question de solitude,
de harcèlement, d'alcoolisme et de dépression...
– J'aimerais comprendre là où ça a commencé
à merder chimiquement dans ma vie.
Mais qui a dit que drames et comédies ne pouvaient pas coexister ?
– Oui écoutez, il est possible que la vérité soit triste mais c'est comme...
– Allez merci, on est pressés, pardon.
Justine Triet fait partie d'une génération de jeunes auteurs français
pour qui le rire est moins une fin en soi
qu'un moyen de désamorcer les angoisses du quotidien...
– J'adore le whisky avec du sucre.
– Bah, je vais t'en chercher un. Moi aussi j'adore.
– C'est vrai ?
– Non, enfin, c'était pour créer du lien...
Construit autour d'un parti pris radical,
son premier film mettait déjà en œuvre cette démarche.
Dans "La Bataille de Solférino", on suit, caméra à l'épaule,
une jeune journaliste télé en duplex du QG du PS,
le soir de l'élection de François Hollande.
La captation de cet événement bien réel entre alors en collision
avec la visite imprévue de l'ingérable père de ses deux enfants...
– T'arrêtes là, ok !
– Arrêtez, c'est impossible là !
Au bout des cris et des larmes,
le rire finit par agir comme une soupape, libérant la pression accumulée.
[Rires]
Par ailleurs, les deux interprètes principaux du film,
à l'aise dans tous les registres, jusqu'au théâtre expérimental,
incarnent parfaitement ce renouveau
de la comédie douce-amère à la française...
– Je t'appelle demain pour les enfants ?
– Oui.
Des films d'auteurs intimistes,
pour la plupart fauchés, et bien souvent réalisés par des femmes,
dans lesquels on retrouve donc régulièrement
Vincent Magagne et Laetitia Dosch…
– Merci beaucoup.
– Merci, mais de rien, de rien.
– Bah, je vous invite à laisser la place parce que y'a...
– Ah oui, pardon ! – Y'a d'autres candidates.
– D'accord, d'accord.
... mais aussi Vimala Pons, Noémie Lvovsky, Valérie Donzelli,
ou comme dans "Victoria", Vincent Lacoste et Laure Calamy...
– Alors on va mettre vingt ans à la faire cette étape !
Tu t'en rends compte de ça ou pas ?
Ces choix de casting donnent forcément au film un vernis intello,
comme les rôles plus secondaires, presque tous confiés à des membres
de l'élite culturelle parisienne...
– Ce procès vire vraiment au ridicule.
Artistes contemporains et prix littéraires
côtoient metteurs en scène pointus et anciennes de la Fémis.
Quant à Virginie Efira,
si elle sortait à l'époque de comédies plus grand public,
elle amorçait déjà un virage vers un cinéma, disons...
art et essai.
– Enlève tes vêtements.
Il y a donc une forme de sophistication, voire d'aristocratie
dans les films de Justine Triet,
ainsi que dans tout un pan de la nouvelle comédie française,
représentée notamment par un certain nombre
de cinéastes femmes...
– Donc là, on est dans le train, on va au festival,
et la tension monte.
Ce qui nous amène à la question qui fâche :
Une comédie sensible, nuancée et intello comme "Victoria",
est-ce que ça n'aurait pas aussi tendance à être moins marrant ?
Et par conséquent,
si le public ne se bouscule pas en salles lorsque les femmes sont aux commandes,
ne serait-ce pas tout simplement
parce qu'elles sont moins drôles que les hommes ?
En tout cas, c'est la thèse du polémiste anglais Christopher Hitchens,
qui, en 2007, publiait un article dans Vanity Fair,
sobrement intitulé :
"Pourquoi les femmes ne sont pas drôles."
Elles auraient, selon lui, un rapport plus sérieux au monde,
qu'il explique notamment par leur capacité à donner la vie.
Mais l'auteur omet de remarquer
que l'humour a longtemps été interdit aux femmes.
Comme le rappelle l'historienne Sabine Melchior-Bonnet
dans son ouvrage Le Rire des femmes,
depuis l'Antiquité, les manuels de savoir-vivre apprennent aux femmes
à ne rien livrer d'elles-mêmes, à baisser les yeux et proscrire le rire.
Au XVIIᵉ siècle,
elles sont carrément exclues des spectacles comiques,
autant en raison des intrigues libertines
que de la promiscuité avec un parterre qui rit sans retenue.
Au moins jusqu'à la fin du XIXᵉ,
le rire des femmes est considéré comme impudique, voire obscène.
La comédie a donc toujours été un privilège masculin.
Mais au fond, cette situation ne serait-elle pas dans l'ordre des choses ?
Selon une étude de l'Université du Nouveau-Mexique,
l'humour étant pour les hommes un fort atout de séduction,
leurs blagues seraient en moyenne plus efficaces que celles des femmes.
La domination masculine en matière d'humour
serait donc scientifiquement "justifiée".
Cependant, cette notion d'efficacité est à relativiser,
dans la mesure ou la comédie est un art
qui, précisément, échappe à tout jugement objectif.
Une méta-analyse des chercheurs de l'Université de Hong Kong
a récemment démontré que la perception de l'humour
diffère selon les lieux, les époques et les milieux sociaux.
Le rire est donc un juge-arbitre
corrompu autant par notre culture,
que par le contexte dans lequel il s'exprime.
Façonnée par les hommes et pour les hommes, la comédie telle qu'on la connaît
impose des règles qui, par nature, sont défavorables aux femmes.
Et malgré tout, elles sont nombreuses à y avoir excellé.
Avec Alice Guy en vaillante pionnière,
la comédie au cinéma aurait pu, dès l'origine, être le fait des femmes.
Mais lorsque les enjeux économiques se sont précisés,
les hommes n'ont pas tardé à s'en emparer,
à plus forte raison en France, où le genre a fini par dominer le marché.
Aujourd'hui, les personnages de femmes à l'écran
sont de plus en plus nombreux et variés,
mais ils restent encore, surtout en comédie, largement écrits par des hommes...
– Par ailleurs, Vicky prenait du plaisir à coucher
avec certains hauts fonctionnaires judiciaires...
À l'image de Victoria, dont on voit l'ex s'accaparer l'histoire
dans une atmosphère Mennen Fresh Sensitive,
le premier enjeu pour les femmes est donc de se réapproprier leur récit,
de rejeter les vieux poncifs au profit de nouveaux archétypes comiques,
plus fidèles à la diversité des profils féminins...
– Bon vas-y, c'est bon, cassez-vous, cassez-vous,
bougez !
Qu'est ce qu'on en a à foutre des pauvres...
Plusieurs cinéastes éclairent déjà la voie,
mais pour ce qui est de toucher les foules, le défi reste...
énorme.
Car les grandes comédies populaires
ne triomphent pas seulement sur le terrain du rire.
Elles cartonnent aussi parce qu'elles rassemblent
autour des valeurs qui dominent la société.
Elles sont conviviales, nostalgiques ou bienveillantes.
Elles flattent notre bravoure passée ou nos particularismes régionaux...
– Hein ! – Hein !
... elles confortent les spectateurs comme les spectatrices,
dans une vision du monde commune et familière...
– Un pour Tuche, Tuche pour un !
Dans ce contexte, les points de vue féminins restent
visiblement encore trop subversifs pour fédérer les masses...
– Oui, mais enfin vous savez, il y a quelques années,
j'étais un peu obsédée sexuelle. J'ai couché avec tout mon entourage.
Mais avec l'émergence d'une nouvelle génération de cinéastes et d'actrices,
la comédie dite « féminine » se porte de mieux en mieux.
Patiemment, elle chatouille les habitudes d'un public qui, lui aussi,
se renouvelle,et grâce auquel elle finira bien par devenir populaire.
[♫ Musique ♫]
Oui alors forcément, vous qui venez de terminer cette vidéo,
vous avez tout à coup envie de regarder un tas de films réalisés par des femmes.
Eh bien, ça tombe bien, parce qu'il y en a plein chez notre partenaire Mubi.
Mubi, c'est le service de streaming idéal pour les cinéphiles,
parce qu'on y trouve de tout,
de la comédie douce-amère à la française jusqu'aux films de procès japonais.
Il y a des grands classiques, des films cultes,
des petites pépites de festival,
des films du monde entier et de toutes les époques,
avec chaque jour un titre mis en avant par une équipe dédiée.
Si vous voulez tester, c'est tout simple,
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ainsi qu'une sélection de nos films préférés dispo sur la plateforme.
Et donc, pourquoi les Basques ne peuvent plus rien dire ?
Bah c'est normal, ils sont Bayonnais.
– Comment peut-on...
porter plainte contre quelqu'un qu'on accuse de tentative de meurtre ?
Comment peut-on ?
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