法语助手
2023-01-31
-Savez-vous compter en français ?
Alors, complétez ce qui va suivre.
20, 30, 40, 50, 60 et ensuite ?
Hein « Septante» ?
Vous avez dit « septante » ? Comment pouvez-vous ?
Les Français vont se moquer de vous et de votre impardonnable archaïsme linguistique.
Ils vont vous prendre comme le ridicule pour un Belge ou un Suisse et vouloir vous apprendre à parler le bon français :
pour « septante », « soixante-dix », donc à effectuer l'addition de 60 et de 10.
Pour « huitante », « quatre-vingts », donc la multiplication de 4 par 20.
Pour « nonante », « quatre-vingt-dix », une multiplication suivie d'une addition...
Facile !
D'où leur vient cette drôle de façon de faire
en effectuant un calcul mental aussi absurde qui complique la vie
à tous ceux dont le français n'est pas la langue maternelle ?
Petite incursion dans le monde des chiffres :
dans toutes les langues indo-européennes,
on compte sur une base décimale...
Pour compter des billes, vous les comptez une par une, de 1 à 10.
Lorsque vous avez 10 billes,
vous les mettez dans un filet.
Une fois que vous avez 10 filets, vous les mettez dans un carton.
Si vous vous retrouvez à la fin avec 3 cartons, 7 filets et 9 billes,
vous savez que vous avez trois cent septante-neuf billes. Voilà.
Tout le monde fait comme ça : les Allemands,
les Anglais, les Italiens, les Chinois,
les Grecs, les Hébreux, les Indiens,
les Russes, les Japonais, les Arabes,
les Belges et les Suisses.
Même les Français, sauf qu'ils dévient de la règle une fois le 69 dépassé.
Quelle mouche les a piqués ?
La mouche, c'est la base 20.
Il est facile d'imaginer que l'origine de la base 10, ce sont les 10 doigts de la main dont on se sert depuis des millénaires pour compter.
Vous l'aviez deviné, non ?
Eh bien, figurez-vous, il y a des peuples qui ont découvert qu'en plus des 10 doigts,
ils avaient 10 orteils et qu'ils comptaient par paquets de 20.
C'était par exemple le cas des Aztèques, des Mayas et des Inuits du Groenland.
20 billes font un filet, 5 filets, un carton.
Huitante, ce sont 4 filets : 4x20.
Les Malinkés du Haut-Sénégal ont une façon très poétique de compter par 20 :
le mot signifiant « un homme complet » est utilisé pour dire « 20 » car il a 10 doigts et 10 orteils.
Pour « 40 », ils disent « une couche »,
c'est-à-dire le nombre de doigts et d'orteils d'un couple réuni dans le même lit.
On trouve également des traces de ce système appelé vigésimal chez les peuples celtiques :
les Irlandais, les Bretons, les Gallois, etc.
En breton, « 40 » se dit « daou-ugent » : 2x20.
« 60 » se dit « tri-ugent » : 3x20.
Les Danois vont encore plus loin :
« quatre-vingt-dix », pardon, « nonante » se dit chez eux « halvfemsindstyve » :
« moitié cinq vingtaines » !
Il faut donc compter 5 vingtaines moins la moitié de la dernière vingtaine,
ce qui donne « nonante »...
et aussi mal à la tête !
On suppose que la langue française, comme les langues celtiques, a été contaminée par des peuples habitant le littoral
et comptant par vingtaines, au moment où les peuples indo-européens se sont installés à leur proximité.
Les Suisses et les Belges ont été épargnés de cette contamination pour des raisons géographiques et sont restés fidèles à la logique du système décimal.
Au Moyen Age, en France, on comptait par vingtaines.
Chez Molière, on trouve l'expression « six vingts », on l'utilisait pour dire « 120 ».
Et l'hôpital « Les Quinze-Vingts », à Paris,
a été construit sous Louis IX pour loger 300 vétérans aveugles.
Il s'appelle d'ailleurs aujourd'hui encore « hôpital des Quinze-Vingts ».
La Révolution française a bien tenté d'uniformiser les unités de mesure en instaurant le système décimal partout en France,
mais elle n'a pas réussi à chasser toutes les traces de la base 20.
Contre toute cohérence, les Français s'obstinent à garder ces drôles de chiffres compliqués et extravagants.
Ca sonne chic, c'est différent.
C'est bien connu, en France, on aime être exceptionnel !
沙发还没有被抢走,赶紧过来坐会吧