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C'est au coeur d'un jardin luxuriant que se dresse une œuvre hors des normes et hors du temps.

Ce monument à part qui arrive en 6e position de votre placement, c'est le palais idéal du facteur cheval.

Nous sommes à Hauterives, un petit village de la Drôme.

Et pour Marie-Josée, directrice du palais depuis plus de 6 ans, la magie se renouvelle chaque matin.

Ce que je me dis tous les matins en profissant cette porte, waouh!

On est habité par le lieu, on est habité par le personnage, on tombe amoureux d'un lieu comme ça.

Donc évidemment venir travailler ici, pour moi c'est un truc, enfin c'est énorme.

En effet, difficile de faire plus atypique comme bureau.

Ce décor de travail surprenant est l'œuvre d'un seul homme, un petit facteur rural qui a construit ce palais tout seul pendant 33 ans.

26 mètres de long, 12 mètres de haut, une galerie intérieure, un enchevêtrement de signes, de formes et de symboles.

À première vue on n'y comprend pas grand chose, mais quand on est initié, tout prend un sens.

Il a commencé ici par ce qu'il a appelé la source de la vie.

Donc il a construit une espèce de succession de petites cascades, décorées de plein de coquillages.

Le jardinant cheval, c'était surtout pas un sculpteur, c'est ce qu'on appelle un modeleur.

C'est-à-dire qu'il assemblait des pierres qu'il trouvait le long de ses tournées et qu'il réalisait des petits personnages.

On a ici par exemple ce chien avec ses oreilles et ce corps de chien bassé.

Des géants appelés Vercingétorix, Archimède et César.

Un temple égyptien, Socrate, un univers extravagant inventé de toutes pièces par un homme pas comme les autres.

1879.

Ferdinand Cheval à 43 ans et parcourt à pied une trentaine de kilomètres par jour pour distribuer son courrier.

Un jour il bute sur une pierre étrange et le rêve se met en marche.

C'est la pierre d'achoppement, c'est la pierre sur laquelle il a buté.

Tout est parti de là et c'est amusant parce que c'est la pierre qu'il a placée sur un pied d'estal en dernier sur son palais.

Ferdinand Cheval bâtit son palais sans relâche.

Le soir après ses tournées, aidé de sa fidèle brouette, il remarche pendant des heures pour ramasser d'autres cailloux.

La nuit il poursuit sa construction dans un état second.

Autour de lui personne ne comprend cette excentrique qui empile des pierres dans son potager au lieu de cultiver son jardin.

Les gens nous disent est-ce qu'il n'était pas un peu fou?

Et moi je pose toujours cette question mais qu'est-ce qu'est la folie?

Tous les génies ne sont-ils pas un peu fous?

Heureusement qu'on a des gens un peu fous pour bâtir des monuments uniques au monde.

Je pense qu'ils rêvaient tout simplement.

Et c'est vrai que ce palais est un hymne à la liberté et à la rêverie.

Un palais fou mais idéal, construit sans doute aussi pour se protéger de tous les drames qui ont jalonnés sa vie.

Très jeune, le facteur perd ses parents, sa première épouse Rosalie et deux enfants.

Ses deuils successifs attisent sa créativité et renforcent sa névrose.

Mais la douleur n'est pas sa seule source d'inspiration.

Il faut imaginer qu'on est vraiment à l'époque des expos universels, des premières cartes postales, des magazines illustrés.

Et voilà c'est vraiment tous ces matériaux qui ont nourri l'imaginaire de Cheval.

Ces cartes postales est revue que le facteur livre pendant des années stimule son imagination déjà très fertile.

Et cet homme qui n'a jamais quitté son petit village fait preuve d'une ouverture d'esprit étonnante.

Il se montre même précurseur quand il façonne côte à côte une mosquée, une maison blanche et un temple indou.

Un mélange des genres qui en fait l'illustration parfaite de l'architecture naïve.

Et en 1963, André Malraux, alors ministre de la culture, décide de classer ce monument malgré les protestations de nombreux puristes.

Grâce à cette reconnaissance, le palais a pu être entretenu.

Mais pas facile de travailler sur un édifice qui échappe à toutes les normes artistiques.

C'est le casse-tête permanent de Jean-Loup qui a chapoté les récents travaux de restauration.

Tu sens que les doigts font ça.

Je suis sûr que chaque fois, ils partaient et hop, ils faisaient ceci.

Ici, il faut que l'on se déguise, qu'on prenne le costume du facteur Cheval.

Si on ne le prend pas, ce costume, on loupe.

On est à côté.

Donc c'est l'humilité qui prime.

Si on n'est pas humble devant l'œuvre, on inventera et il ne faut surtout pas inventer.

Ce monument a longtemps déchaîné les passions.

Entre haine et admiration, il a fini par trouver sa place et attire aujourd'hui un public de plus en plus large.

C'est une maison bleue, la dossier accueillie.

Chaque été, le Palais accueille un festival musical.

Ce soir à l'affiche, Maxime Leforestier, adossé à une scène qui le laisse presque sans voix.

Ça m'est déjà arrivé de jouer dans des décors bizarres, mais celui-là,
je pense que c'est le meilleur.

Anne-Marie a été gérante du Palais et a vécu dans l'ancienne maison du facteur pendant 32 ans.

Des stars, elle en a vu passer à la pelle.

C'est elle qui leur tendait le fameux livre d'or dans lequel elle se replonge aujourd'hui.

Vous étiez là par exemple quand Catherine Deneuve est passée?

Oui, oui Catherine Deneuve, j'en ai un bon souvenir parce qu'elle était gentille avec tout le monde.

Jean-Louis Trentignant, Jeanne Moreau.

On a Jeanne Moreau, ici éblouie et touchée par ce rêve fantastique.

Vous avez aimé ce facteur, ce Palais?

On ne peut que l'admirer, c'est sûr.

Il n'a pas toujours été admiré par ceux qui auraient dû l'admirer.

Ça vous a plu?

Passionnément.

Ferdinand Cheval est mort en 1924 et il avait tout prévu.

Il est enterré au cimetière de Haude-Rive, donc on peut faire un petit tour au Palais du facteur Cheval et puis passer également au cimetière.

Je crois qu'on en sort toujours avec quelques instants et quelques phénomènes d'aspiration.

10 000 journées, 93 000 heures, 33 ans d'épreuves, plus aux pignâtres que moi se mettent à l'œuvre.

Voilà le dernier défi lancé par le facteur, comme des centaines d'autres qui ornent les murs de son palais et qui continuent à faire rêver toutes les générations.

On travaille dans ce monde.

Sur cette terre, comme l'ombre, nous passons, sortis de la poussière.

Je forçais parfois la nature et cette merveille dont l'auteur peut être fier.

L'enfant vient en cette vie, les mains pleines d'avenir.

Travail de géant.